Cette semaine et à l’occasion de la sortie de son livre « Ajacied », l’équipe de Racingfoot.fr a eu l’opportunité d’échanger avec l’ex-international Hollandais Sonny Silooy (25 sélections) qui a porté les couleurs Ciel et Blanc durant presque deux saisons à la fin des années 80. Joueur légendaire de l’Ajax d’Amsterdam, actuellement entraîneur du Sharjah FC aux Émirats Arabes Unis, il a eu la gentillesse de revenir sur son parcours et sur son expérience de Racingman.
🎙 Bonjour Sonny, merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation. Afin de commencer cet entretien et comme nous sommes en pleine Coupe du Monde, auriez-vous la possibilité de nous parler de votre premier souvenir avec la sélection hollandaise ?
S.S : Ma toute première sélection a eu lieu le 12 octobre 1983 contre l’Irlande, un match très important pour notre sélection, car il s’agissait d’un match de qualification pour la coupe d’Europe 1984. Nous gagnons ce match (2-3). Je me souviens surtout de leur gardien de but, Jim McDonagh.
🎙 Vous avez porté les couleurs du Racing entre 1987 et 1989, pouvez-vous nous dire comment s’est déroulée votre arrivée au club ?
S.S : À l’époque, j’étais en contact avec Antonio Florencio, manager du FC Porto où jouait l’international portugais Paulo Futre lors de la saison 86/87. Paulo Futre était un grand ami d’Artur Jorge… Lorsqu’Artur Jorge arrive sur le banc du Racing, il voulait absolument que je le rejoigne. Je ne savais vraiment pas quoi faire, j’ai même contacté Johan Cruyff afin qu’il me donne son avis. Pour lui, pas de doute, signer au Racing et rejoindre la France étaient de belles opportunités. Le Racing m’offrait un très beau contrat de quatre ans et l’effectif était composé de grands joueurs. À la suite de plusieurs conversations avec le président de l’époque, Jean-Louis Piette, je décide de m’engager au Racing. C’était un véritable tournant dans ma carrière.
🎙 Pouvez-vous nous parler de cette période du Matra Racing ? Comment expliquez-vous l’échec malgré les grands noms présents au club ? Quel est le joueur dont vous avez gardé le meilleur souvenir ?
S.S : Il y avait de tops joueurs, plein d’énergie et chacun voulait être le leader sur le terrain et dans le vestiaire. J’étais entouré de joueurs dotés d’une énorme personnalité. Je me souviens surtout de Maxime Bossis, qui parlait très bien anglais et avec qui je suis toujours en contact. C’est également le cas avec Alim Ben Mabrouk, Luis Fernandez, Enzo Francescoli ou encore Pascal Olmeta… J’ai été ravi de pouvoir jouer avec eux et d’évoluer dans le championnat de France. J’échange également avec d’autres joueurs qui faisaient partie des plus jeunes à l’époque comme Stéphane Blondeau et François Darcy. Ils ont beaucoup changé physiquement, ils paraissent beaucoup plus vieux que moi maintenant ! (rires)
🎙 Comment était l’ambiance au sein de cet effectif ?
S.S : Il y avait une très bonne ambiance entre nous, même si de l’extérieur, les gens pouvaient penser le contraire. Lors de la saison 88/89 tout s’est fortement compliqué. La triste situation personnelle d’Artur Jorge, du fait de l’état de santé de son épouse, l’avait poussé à abandonner son poste d’entraîneur du Racing. René Hauss qui avait assuré l’intérim m’avait paru être un très grand coach, mais assez dur. Ensuite, est arrivé Luc Bruder, qui était trop jeune et qui ne disposait pas de l’expérience nécessaire pour gérer un effectif de cette taille selon moi.
Aussi, certains pensent que la barrière de la langue a été une des raisons de la mauvaise adaptation de certains joueurs. Pour moi, c’est faux. Je n’ai jamais eu trop de difficultés avec le français. Le football est un langage universel, quand tu veux le ballon, tu fais signe, tu émets un son et tu reçois le ballon. Si tu ne dis rien, tu n’auras pas le ballon… Il est vrai que quand tu changes de pays et de championnat, il faut forcément changer un peu sa mentalité. Le football français, à cette époque, était très physique et a beaucoup évolué depuis. En Hollande par exemple, on a maintenu constamment notre même philosophie de jeu sur le terrain et tout au long de ces années, on a toujours été très fort techniquement.
🎙 Le désengagement de Matra est synonyme de la fin du projet… Selon vous, qu’est-ce qui a amené Jean-Luc Lagardère à prendre cette décision ?
S.S : Quand on parle de Jean-Luc Lagardère, on parle de quelqu’un qui voyait les choses en grand et qui jouissait d’une sacrée réputation grâce aux nombreux succès qu’il avait obtenus durant toutes ces années.
Après l’échec de la saison 1988/1989, l’association du Matra et du Racing était probablement dommageable pour son groupe. Il a certainement dû laisser tomber le football pour éviter des problèmes… mais on ne connaîtra jamais vraiment la réelle raison de la sortie de Matra du Racing.
Lors de la saison 88/89, plus de 10 nouveaux joueurs arrivent au club parmi eux, Ginola, Casoni, Dogon, Anziani, Guérin… C’était vraiment fou pour l’époque ! Nous avions un groupe de 25 grands joueurs avec une rotation très faible au niveau du onze de départ. À un moment donné, je me suis demandé « Qu’est-ce que je fais ici ? ». C’est à ce moment que je demande aux dirigeants du Racing de pouvoir retourner à l’Ajax. C’est un club avec lequel j’avais joué durant sept années avant d’arriver au Racing et avec lequel j’ai joué 7 saisons de plus après avoir quitté Paris. Dès que l’argent du transfert est arrivé, je suis retourné à Amsterdam immédiatement. Avec l’Ajax, je remporte pas mal de trophées, dont la Ligue des Champions, la Ligue Europa et une Super Coupe. C’est incroyable de repenser au niveau qu’avaient l’Ajax et la Hollande à cette époque… Après ma carrière de joueur, je suis devenu entraîneur des catégories U11 et U12 puis des U19 de l’Ajax. J’ai notamment entraîné des joueurs comme Davy Klaassen (sélectionné pour la Coupe du Monde) et Daley Blind.
Happy Birthday to Sonny SILOOY. Former Ajax Amsterdam and Matra Racing of Paris pic.twitter.com/CtwCr7AHXh
— Old School Panini (@OldSchoolPanini) August 31, 2013
🎙 Malgré la distance, quelle votre perception sur le Racing actuellement ?
S.S : Les choses ont beaucoup changé depuis les années 80. J’aime toujours autant Paris et j’y vais de temps en temps avec mon épouse, c’est à deux heures de TGV. Mon dernier voyage était en 2020 un peu avant la pandémie. Sincèrement, c’est une ville qui m’a touché.
Pour revenir au Racing, le club a remporté le championnat de National 3 ce qui démontre que le projet sportif du nouveau Président commence à porter ses fruits. Ce serait merveilleux de revoir le Racing en Ligue 1 ou Ligue 2 un jour, ce club le mérite et en a vraiment besoin. S’appuyer sur les jeunes est une très bonne initiative.
🎙 Pour clôturer cet entretien, quel est votre souhait pour le Racing ?
S.S : Le Racing doit faire le nécessaire pour retrouver la place qui lui appartient. Je me sens fier d’avoir évolué dans un aussi grand club. C’est un honneur d’avoir pu porter ce fabuleux maillot Ciel et Blanc. Comme je vous l’ai dit, je suis toujours en contact avec certains de mes anciens coéquipiers et tous ont énormément de respect pour ce club. Je souhaite sincèrement le meilleur pour cette institution et Allez Racing ! 🔵⚪️
Entretien réalisé par Carlos Bofi.