Le 3 juin 1987, le Racing décrochait la deuxième Coupe Gambardella de son histoire au Stade Auguste Delaune en s’imposant devant Grenoble (2-1). 35 ans plus tard, nous sommes partis à la rencontre de Randolph Gohi, Hippolyte Dangbeto et Christophe Hageman, trois des membres de cette incroyable équipe qui aura décroché l’un des derniers titres majeurs de l’histoire du club…
Tout d’abord, bonjour à vous trois. Aujourd’hui, quels souvenirs ou anecdotes restent-ils de votre fantastique parcours dans cette Coupe Gambardella ?
Randolph Gohi : Je me souviens très clairement que c’est face à Lille en 16e de finale (victoire aux TAB 5-4), que nous avons commencé à y croire fermement. Le choc face à Brest en quart avec un but de Hageman a également été très important. Nous sentions tous que nous pouvions gagner ce trophée, le chemin paraissait plus clair que lors de la phase de poule disputée face aux équipes de la région parisienne. Des matchs pièges, toujours très difficiles à gérer. Je me rappelle par exemple que nous perdons 3-1 face à Alfortville et que nous devions attendre leur prochain match, sans avoir notre destin entre nos pieds, pour être sûr d’être qualifiés pour la phase finale. Les parcours en Coupe sont difficiles, tout se joue sur un match et tu peux te retrouver en difficulté face à des formations hiérarchiquement inférieures. Nous nous étions qualifiés pour les phases à élimination directe par la petite porte et on connaît pourtant la fin de l’histoire.
Hippolyte Dangbeto : Concernant les anecdotes je ne m’en souviens pas de beaucoup et celles dont je me souviens, je les garderai pour moi (sourire). Ce que je peux vous avouer, c’est qu´entre nous, Gohi, Hageman ou bien Jumel, on était des petits marrants. Il y avait beaucoup de chambrage et on avait l’habitude de faire des petits paris entre nous. Pour ce qui est de notre parcours, je rejoins mon capitaine Randolph Gohi. La qualification contre le LOSC avait été un match compliqué mais également fondateur pour la conquête du titre quelques mois plus tard. Je garde également le souvenir de la demi-finale contre Beauvais. Après cette rencontre, nous étions sûrs de pouvoir renverser n’importe qui. Nous nous entraînions au moins une fois par semaine avec le groupe professionnel, se confronter à meilleurs que nous et avoir l’ambition de constamment rivaliser, c’est ce qui nous aidé à forger notre mental. Nous étions également très bien entourés. En plus de notre entraîneur Silvester Takač et de son adjoint Roger Fleury, je tiens également à citer Jean-Marie Lawnizack, Bruder, Zvunka. Chacun d’eux nous avait apporté quelque chose en plus et surtout nous avait inculqué la « culture de la gagne », celle qui te pousse à ne jamais rien lâcher !
Christophe Hageman : J’étais le plus jeune du groupe à l’époque, j’avais 16 ans, participer à cette aventure, à cet âge, c’était déjà quelque chose d’incroyable. Contre Brest, je marque l’unique but du match, celui qui nous donne la qualification. Le 16e contre Lille et la demi-finale contre Beauvais, qu’on remporte aux tirs aux buts sont aussi d’excellents souvenirs. C’était notre dernière saison en Junior, on était un groupe fort, encadré par des éducateurs de qualité. Encore une fois, tous les ingrédients étaient réunis pour qu’on aille au bout. Nous étions jeunes mais nous nous sommes donnés à fond pour ce maillot, et aujourd’hui, c’est ça qui me rend le plus fier.
Et en ce qui concerne cette finale au Stade Auguste Delaune de Reims face à Grenoble ?
R.G : En arrivant à Reims, je me rappelle la grande confiance qui régnait dans le groupe, c’était comme si rien ne pouvait nous arriver. J’étais le capitaine et je peux vous dire que nous formions un groupe de joueurs très costauds mentalement. De plus, nous étions sûrs de notre football, d’ailleurs beaucoup de joueurs du groupe finiront par signer professionnel après cette finale. Plus personnellement, le souvenir qu’il me reste le plus est celui du coup de sifflet final. La délivrance et le soulagement mais aussi beaucoup de joie. Moi non plus, je n’oublie pas notre super coach Silvester Takač et son adjoint Roger Fleury ou encore Monsieur Piette qui était venu nous féliciter après la remise du trophée.
H.D : C’est vrai que nous avions le bon état d’esprit, sûrs de nos forces, nous étions persuadés de pouvoir remporter ce titre. La finale se jouait effectivement à Reims dans un stade Auguste Delaune mythique, celui de Raymond Kopa et tant d’autres. J’ai le souvenir d’un match assez rude sur le plan physique, il y avait également en face de nous beaucoup de bons joueurs et notamment un certain Youri Djorkaeff, futur champion du monde 1998. Personnellement, je marque le but du 2-1 qui nous permet de remporter le match et cette coupe. Un souvenir incroyable, je me rappelle avoir couru vers le photographe, le poing serré, presque déjà victorieux !
C.H : Entre nous, cette coupe Gambardella, c’était il y a longtemps. On a tous pris de l’âge et pour moi les souvenirs sont lointains. Pour cette finale, je me rappelle surtout une chose, c’est que nous étions soulagés de ne pas être tombés sur Auxerre qui était le tenant du titre. Comme mes coéquipiers, je me souviens de ce stade Auguste Delaune, et de la demi-finale entre Reims et l’OM qui devait se tenir après notre match. Nous gagnons ce titre au mental. Comme cela a déjà été dit, certains de nos joueurs étaient très proches de l’équipe première et cela s’est vu sur le terrain. Tout comme Randolph et Hippolyte, je tiens à rendre hommage à notre coach de l’époque, Monsieur Takač.
Pour vous, quelle place avait la formation dans ce projet galactique du Matra Racing ?
R.G : Pour être sincère, il n’y avait pas beaucoup de place pour les jeunes pendant la grande période Matra. L’équipe première était composée de joueurs de très haut niveau. Même si nous avions un directeur de la formation, monsieur Zvunka, qui nous a toujours aidé, ce n’est qu’après le désengagement de Jean-Luc Lagardère en mars 1989 et avec le départ de beaucoup de grands noms, que la formation du Racing a pu prendre une place prépondérante. Même si nous n’avons pas pu éviter la descente en 1990, je suis sûr que nous aurions pu faire de très bonnes choses en D2 la saison suivante…
H.D : Même si c’est vrai qu’à cette époque là, les stars qui composaient l’équipe première ne pouvaient offrir que peu de perspective à de jeunes joueurs comme nous, je pense que la volonté de bien former et de faire progresser la jeunesse a toujours été présente au Racing. Ça fait partie de l’ADN du club. Je suis de l’avis de Randolph en ce qui concerne notre capacité à bien figurer en deuxième division si on nous avait laissé l’occasion de tenter notre chance. Nous étions de très bons jeunes et je pense que certains cadres comme Alim Ben Mabrouk ou Michel Milojevic seraient restés avec nous pour sauver le club. On ne refera pas l’histoire mais, après la finale de la Coupe de France et la descente en D2, la direction du Racing Paris 1 a fait le choix de repartir en D3 et vous connaissez la suite…
C.H : Je suis du même avis que mes anciens coéquipiers sur la mauvaise utilisation qui a été faite, à l’époque, du vivier de jeunes joueurs qui aurait pu sauver le club. Pourtant, je préfère mettre cela de côté et garder en mémoire le fait d’avoir représenté le Racing, un club mythique. Pour un jeune comme moi, avoir eu la chance de côtoyer tous ces grands noms du football, et de jouer en professionnel si jeune, c’était incroyable et cela me suffit. Je garde un très bon souvenir de mes années de formation au Racing, sans parler de la fierté d’avoir participé au palmarès du club en décrochant cette magnifique Coupe Gambardella. Ça a vraiment été un rêve de bout en bout.
Prenons de vos nouvelles, que devenez-vous aujourd’hui ?
R.G : Actuellement je me dédie au coaching, tant dans le milieu professionnel que dans la sphère du personnel. Ma démarche est inspirée par la neuroscience, je travaille avec des entrepreneurs, des particuliers ou encore des sportifs. J’interviens sur différents champs comme celui de la motivation. Plus globalement, j’agis surtout sur la mise en action. L’idée est de libérer le potentiel des personnes dont je m’occupe, quel que soit leur domaine de compétence.
H.D : De mon côté, j’interviens toujours dans le football plus particulièrement dans la formation des plus jeunes. Je peux vous dire que c’est indirectement grâce au Racing que j’ai compris que je voulais continuer dans le football et devenir entraîneur. À l’époque j´étais encore joueur au SM Caen, et au détour d’un match, je rencontre un certain Bruno Cheyrou. Il m’a interpellé car tous les mercredis, je m’occupais déjà des jeunes au Racing. Il m’a remercié pour le temps que je lui avais consacré et les enseignements qu’il avait pu tirer de cette période. C’est à ce moment que j’ai pris la mesure de l’impact qu’un éducateur peut avoir sur les jeunes dont il s’occupe.
C.H : Après plusieurs blessures notamment trois ruptures du genou, j’ai mis un terme à ma carrière de joueur. Par la suite, je suis moi aussi devenu éducateur. Je travaille aujourd’hui en section sportive, je suis également responsable de l’école de football et aussi entraîneur des seniors à Brecey une ville proche d’Avranches (D1).
Enfin, avez-vous quelques mots pour les jeunes joueurs du Racing qui portent haut les couleurs du club tous les week-ends que ce soit en championnat ou en Coupe ?
R.G : Le conseil le plus important que je peux donner à la nouvelle génération, c’est avant tout qu’ils restent attentifs à la notion de plaisir et qu´ils n´oublient pas pourquoi ils jouent au football. Les jeunes doivent avant tout s’engager sur le plaisir de jouer et de s’épanouir en équipe. Aujourd’hui, l’argent a changé le football, dans ce contexte, il est primordial de savoir savourer le moment. Quand on est jeune, le travail et la progression doivent toujours être reliés à l’épanouissement. La jeunesse est une période de la vie qui passe très vite, ce sont des moments qui ne reviendront plus. Pour le Racing et son avenir, je me permettrai simplement de dire que c’est par et avec leurs jeunes que le club retrouvera les sommets. Aujourd’hui le Racing monte en National 2, c’est un bon début, le travail doit continuer autour de personnes qui croient en ce club.
H.D : J’aimerais surtout leur dire qu’à ce niveau là, il faut travailler et toujours en faire plus tous les jours. Un club comme le Racing se doit d’avoir des équipes de jeunes qui performent que ce soit en Gambardella ou dans les autres compétitions. Pour le reste, quand on porte ce maillot, il faut aussi bien briller individuellement qu’en équipe. La solidarité, le travail, le plaisir, voilà ce que je peux souhaiter à nos jeunes Racingmen.
C.H : Je compléterais les dires de mes camarades en insistant sur le respect qui est dû à ce club et à ses couleurs ciel et blanc. Vous êtes les héritiers d’une grande histoire, et si vous avez conscience de cette responsabilité, le travail nécessaire ne sera pas un effort et le plaisir viendra tout seul. Allez Racing !
Entretiens réalisés par Carlos Bofi et Baptiste Boulfort.
Je connais très bien ces garçons (ami de Stéphane), encore aujourd’hui l’amour du maillot est présent. Ce groupe s’est formé pendant des saisons pour devenir une bande de potes, qui à ce jour sont en contact régulier.
OUI un très grand moment cette finale à Reims..
Après des années de néant (trop longtemps), l’espoir revient de rejoindre l’élite des clubs Nationaux