Interview recueillie par Vincent Le Borloch
Au moment où la saison s’achève sur une large victoire des 16 ans du RACING en finale de la Coupe de Paris, quel bilan tirez-vous de l’exercice 2023/2024 ?
𝐏.𝐍 : Je veux être positif en soulignant avant tout l’exceptionnel parcours de l’ensemble de nos équipes de jeunes, des U11 aux U18, en passant par nos équipes premières féminine et réserve séniors masculine, composées elles-aussi de jeunes issus de notre formation. Toutes ont remporté cette saison leurs championnats régionaux et départementaux respectifs.
Nous retrouverons donc la saison prochaine deux équipes évoluant au niveau national en 17 ans et en 19 ans. Je crois pouvoir dire que nous avons vécu au niveau des jeunes une saison inédite que l’on peut marquer d’une pierre blanche.
Venant en à l’équipe première qui, après avoir tenu la dragée haute au LOSC en 16e de finale de la Coupe de France, avoir joué les premiers rôles de son championnat durant la première partie de saison, est finalement reléguée en National 3, victime de la refonte des championnats qui imposait cette saison cinq, voir six descentes sur un groupe de 14 équipes.
𝐏.𝐍 : Nous avons surtout été victimes de notre manque de réalisme. On peut épiloguer sur la qualité supposée de cette équipe et se griser de mots en se disant que nous méritions mieux. La réalité ne s’embarrasse pas de ce type de considérations. Nous sommes à la fin à la place qui est la nôtre. Il s’agit maintenant d’en comprendre les raisons et de s’en servir pour la suite.
Quelles sont ces raisons justement ?
𝐏.𝐍 : Je pense que notre parcours en Coupe de France nous a beaucoup coûtés. Un certain nombre de joueurs ont décroché de manière inconsciente après ce match. La gestion de la décompression mentale qui permet le maintient de la performance reste l’apanage des joueurs de haut niveau. Ensuite, je vais m’abstenir d’épiloguer sur ces pseudos agents qui tournent autour des joueurs et qui à l’évidence les ont beaucoup perturbés après leur mise en lumière. Le staff technique a évidemment sa part de responsabilité. Les bonnes réponses n’ont pas été trouvées. Et puis enfin, pour rester dans les grandes lignes, le contexte effectivement de la refonte des championnats qui impose que presque la moitié des équipes d’une poule soient reléguées en fin de saison n’a pas joué en notre faveur.
Songez que nous sommes relégués pour un but de différence au goal à virage avec le 9e. Nous avons totalisé le même nombre de points (34), le quatrième du championnat a fini avec 38 points.
Il y a un point noir que vous n’évoquez pas, celui du Stade Olympique. Cela n’est-il pas pénalisant à la longue de ne pas avoir de terrain, de jouer tantôt à Versailles, tantôt à Boulogne, de s’entraîner une fois à Frédéric Chazotte, une autre fois à Yves-du-Manoir, ou encore à la Grenouillère à Sceaux, comme c’était le cas régulièrement la saison dernière ?
𝐏.𝐍 : Notre déracinement depuis deux ans joue fatalement un rôle. Et contrairement à ce qui nous avait été dit, cela va durer encore toute la saison 2024/2025.
Je ne peux pas nier que ce statut de « nomade » qui est devenu le nôtre ces deux dernières saisons et qui va se poursuivre, constitue pour nous un déficit de repères, une perte d’identité et d’appartenance qui ne sont évidemment pas propices à la performance. Je ne veux pas chercher d’excuses, mais le contexte que nous devons supporter en raison des Jeux olympiques nous a déjà probablement coûté la montée en National 1 la saison dernière, et nous a une nouvelle fois considérablement handicapé cette saison.
Vous ne deviez pas récupérer le stade Olympique au mois de novembre prochain ?
𝐏.𝐍 : Le club de rugby du RACING 92 fait son grand retour au Stade Yves-Du-Manoir. Des travaux importants sont prévus pour la construction d’une enceinte de 15 000 places. Nous devrons encore patienter pour fouler la pelouse du Stade olympique que nous partagerons avec le rugby un week-end sur deux.
Cette situation n’est-elle pas également très pénalisante sur le plan financier ? Pas de spectateur, pas de buvette. Il y a un coût, j’imagine, non négligeable directement relié à la présence de Jeux olympiques à Yves-du-Manoir ?
𝐏.𝐍 : Entre la redevance annuelle prélevée par le Département pour l’utilisation du Stade Yves-du-Manoir, la location des stades de Boulogne, de Versailles, mais également de Chambly pour le 16e de finale de la Coupe de France, notre dépense s’est élevée cette saison à 88.000 euros.
La commune de Colombes et le Département ont-ils consentis des efforts particuliers pour vous aider financièrement à affronter cette situation qui n’est pas de votre fait ?
𝐏.𝐍 : Pour le moment non. Vous savez, j’ai pris l’habitude de faire contre mauvaise fortune bon gré, et je préfère retenir que nous disposons désormais de magnifiques installations dédiées à la progression de nos jeunes. Et ça, comme dit la chanson « ça vaut de l’or ».
C’est la méthode Coué ?
𝐏.𝐍 : (Rire…) Si vous voulez.
Changeons de sujet, si vous le voulez bien. Il se dit que le RACING pourrait être repêché ?
𝐏.𝐍 : Il se dit beaucoup de choses. Nous avons besoin de certitudes, pas d’espoirs déçus. Je considère aujourd’hui que nous sommes en National 3, et que si un événement que nous ne maîtrisons pas doit se produire, il sera toujours temps d’y faire face. Notre réussite passe par notre capacité à rebondir et à transformer cet échec en une expérience pour l’avenir.
Votre ambition de ramener le RACING vers le sommet reste-t-elle intacte ?
𝐏.𝐍 : Pourquoi voudriez-vous que cette ambition change ? Ce n’est d’ailleurs pas une ambition personnelle. Le RACING par son histoire, son palmarès, porte à lui seul cette ambition. Les jeunes sont sur orbite. Je vais mettre des moyens supplémentaires encore plus importants pour qu’ils y restent. Je crois dur comme fer que la solution pour arriver en haut passera par eux. Pensez qu’aujourd’hui en Île-de-France, seuls quatre clubs ont des 17 et des 19 ans nationaux. Le PSG, le PFC, MONTFERMEIL et le RACING.
S’agissant de l’équipe première, je n’ai jamais pensé que nous allions monter saison après saison, et que nous serions en Ligue 1 d’un claquement de doigts. Je mesure la difficulté de l’entreprise. Je ne me précipite pas, je sais d’où nous venons, c’est un long chemin, il y aura d’autres déconvenues, je m’y attends.
Où en est la procédure contre la DNCG qui a permis au FC ROUEN d’accéder au championnat de National 1 la saison dernière, en lieu et place du RACING ?
𝐏.𝐍 : Nous attendons d’être audiencés. La DNCG a commis une erreur. L’instance reconnaît elle-même sa faute.
Extrait du Procès Verbal de la DNCG :
« Le FC ROUEN n’aurait pas dû accéder au championnat national… (….) L’équité sportive a ainsi été rompue. »
On ne peut pas être plus précis. Le RACING n’a donc pas à s’épuiser à démontrer la défaillance de la DNCG.
L’application de l’article L 132-2 du code du sport imposé par l’État aux associations sportives est parfaitement clair.
« Les associations sportives ont la mission d’assurer la pérennité des clubs, de favoriser le respect de l’équité sportive et de contribuer à la régulation économique des compétitions conformément aux objectifs qui lui sont assignés par la loi. »
Le RACING a subi de plein fouet l’inobservation de ces obligations. La DNCG a manqué à son devoir de contrôle. Il s’agit à présent de réparer l’équité sportive et de réparer le RACING dans le droit qui était le sien. En ce sens, « le droit » est constant. Il faudra qu’il y ait réparation. À la justice de nous dire comment elle entend réparer ?
Une intégration au Championnat de National 1 la saison prochaine ?
𝐏.𝐍 : C’est ce qui vient en premier à l’esprit. Il y a plusieurs précédents, l’équipe de Strasbourg en 2012, repêchée après le 15 juillet, le championnat de National 1 s’était déroulé à 21 équipes. Plus récemment encore, lors de la saison 2018/2019, l’équipe de Sedan avait fini 2e de National 2. Le club avait été maintenu en National 2 lors de la saison suivante, et repêché en National 1 au titre de sa place de meilleur 2e de la saison 2018/2019, lors de la saison 2020/2021.
Avez-vous quelque chose à ajouter ?
𝐏.𝐍 : Je ne veux pas terminer sans remercier toutes les personnes qui œuvrent au quotidien à la renaissance de ce grand club qu’est le RACING. Les bénévoles toujours plus nombreux à s’impliquer à tous les niveaux pour faire grandir le projet, nos éducateurs et entraîneurs qui ont fait un travail fantastique cette saison, notre staff administratif de plus en plus étoffé, condition indispensable à notre structuration, les collectivités publiques, et enfin nos partenaires qui croient en notre histoire et qui saison après saison nous renouvellent leur confiance.
Qu’est-ce qu’il faut souhaiter au RACING pour la saison prochaine ?
𝐏.𝐍 : De prendre ce qui viendra, de ne rien lâcher, et de vivre heureux.